Les grands axes du design
11 septembre 2025 - Guilhem
Quelles sont les lignes directrices de la conception de Zag ? Dans ce nouvel article, je vous parle des choix techniques qui se cachent derrière le design de notre vélo cargo.
Sommaire :
Un vélo cargo
Un cadre rigide et bas
De l’acier chromo
Un cadre en taille unique
Des roues de 24 et 20 pouces
Un vélo résilient
Un vélo couteau-suisse
Un vélo cargo
Je l’évoquais dans le premier article du blog : l’idée de départ, c'était de créer un vélo électrique de voyage, capable d’emporter du poids (bagages et batteries de rechange) tout en restant sympa à piloter.
Le vélo cargo s'est très vite imposé comme une évidence.
On distingue 3 catégories principales : le longtail, le biporteur « bas » (type Bullitt), et le biporteur « haut » (type Omnium). Par haut, j’entends avec la zone de portage au-dessus de la roue avant. Cela élève le centre de gravité, mais raccourcit beaucoup le vélo et son empattement - essentiel pour le côte joueur. J’ai rapidement éliminé le longtail : lors des nombreux essais que j’ai pu faire, j’ai toujours préféré les vélos chargés à l’avant. Le choix du biporteur haut s’est confirmé après plusieurs mois de test d’un Omnium, y compris en voyage.
2. Un cadre rigide et bas
Après avoir validé le type de vélo, je me suis demandé ce que je souhaitais faire de différent par rapport au marché existant. J'avais 2 exigences principales : un vélo cargo court et rigide.
Le 1er prototype n'a pas répondu à mes attentes et j'ai dû repasser de longues heures sur la modélisation, aidé par le bureau d'études Antidote Solutions (merci à Ben !) C'est ainsi qu'est née la « triangulation » de la partie avant, avec la connexion du rack directement à la colonne de direction, pour raidir l’ensemble. Sur le 2ème prototype, la différence de comportement en charge a été très nette.
Cette recherche de rigidité a aussi justifié :
des sections de tubes renforcées,
l'absence de suspension – qui permet en outre de garder une zone de portage la plus basse possible (pour la stabilité et l'agrément de conduite).
Au global, on obtient un cadre rigide, très résistant, compact, et forcément un peu plus lourd que si la chasse au gramme avait été l’objectif n°1. Le Zag reste toutefois un cargo plutôt léger : 28.5 à 30 kg en version électrique (selon pneus, béquille, garde-boues), et environ 6 kg de moins pour une future version musculaire.
Enfin, le cadre sloping, directement inspiré du VTT et du dirt, donne à notre vélo cargo une silhouette unique, tout en permettant d’abaisser le centre de gravité et la hauteur d’enjambement.
3. De l’acier chromo
J’ai retenu l’acier dès le début du projet, principalement le chromo, un acier haute résistance* qui est la variante généralement utilisée sur les cadres en acier des vélos haut de gamme.
Pourquoi ?
Parce que j’aime ce matériau : mon premier VTT « maison » était un Sobre en chromo – il roule toujours 15 ans plus tard.
Parce qu’il est facilement réparable en cas de besoin.
Parce qu’il a un bon bilan carbone (5 à 10 fois meilleur que l’aluminium par kg produit).
Parce qu’il permet de belles soudures (TIG dans notre cas).
Parce qu’il est résilient : contrairement à l’aluminium, l’acier possède une limite d’endurance, c’est-à-dire une résistance en dessous de laquelle il ne descendra pas, quel que soit le nombre de cycles qu’il subit.
4. Un cadre en taille unique
Ce point est arrivé très vite dans la conception : devait-on penser le cadre en une ou plusieurs tailles ? Dans l’univers du vélo cargo, il y a les 2 écoles, même si la taille unique domine. Par exemple, l’Omnium existe en 5 tailles, le Bullitt en une seule.
La taille unique a toujours eu ma préférence. En premier lieu, je voulais un vélo capable de s’adapter aux cyclistes via une conception optimisée du cadre et les composants périphériques (potence, tige de selle). Ensuite, le design original du cadre se prête peu à un redimensionnement. Enfin, la taille unique permet au même vélo d’être partagé entre différents membres d’une famille ou d’une entreprise, et rationalise la production.
Ce sont les raisons pour lesquelles le cadre du Zag est proposé en une seule taille.
Ce choix a demandé quelques spécificités dans la conception :
Angle de tube de selle relativement couché, pour accentuer le recul de l’assise quand on monte la selle, par rapport à un angle classique. Mais le tube de selle est également avancé par rapport à l’axe de pédalier, ce qui maintient un angle virtuel compatible avec une utilisation sportive ou voyage (72° à 73°).
Tige de selle en 2 parties (ou télescopique), pour maximiser l’amplitude (hauteur de selle possible de 50 cm à plus de 85 cm), et permettre l’utilisation d’une tige de selle suspendue quelle que soit la taille du cycliste.
Cockpit ajustable : la Speedlifter offre 10 cm de réglage en hauteur, et la potence existe en 3 longueurs (70, 90 et 110 mm) afin d’ajuster parfaitement la position, aussi bien en reach qu’en stack.
Au final, le vélo convient pour des cyclistes d’environ 1m60 à 1m95. Je mesure 1m89 et suis vraiment bien dessus, y compris sur des journées de 150 km comme j’ai pu en faire en voyage. Sixtine (ma co-équipière dans cette aventure), l'est également, avec ses 1m72. Des testeurs de plus de 1m90 et moins de 1m60 l’ont aussi validé. Le mieux pour s’en convaincre... c’est de l’essayer !
5. Des roues de 24 et 20 pouces
La roue avant de 20 pouces était une évidence, c’est un standard bien établi dans le vélo cargo qui permet d‘abaisser la zone de portage.
À l’arrière, j’ai d'abord testé une roue de 27.5″, puis de 26″, pour choisir finalement 24″ sur le 2ème prototype et la série. Sur un vélo court, ce format se marie visuellement très bien avec le 20″ à l’avant, et abaisse le centre de gravité. Il permet aussi d’avoir 2 roues solides et rigides, de passer sous la barre des 2 mètres de longueur tout en gardant une vraie zone de chargement... et d’avoir ainsi un vélo cargo qui puisse se glisser dans un ascenseur, un hall d’entrée, une chambre d’hôtel, ou un train.
Également, cadre et fourche ont été conçus pour accueillir des pneus larges, jusqu’à 2.60″ (65mm) de section, pour le confort et l’adhérence, aussi bien sur route qu’en dehors.
Les jantes Mach 1 Trucky 35 (35mm de largeur interne) offrent un support optimal à ces pneus, tout en acceptant des sections inférieures (jusqu’à 2.30″ - 58mm).
6/ Un vélo résilient
Un autre des axes fondateurs du design, ce sont les platines moteur et batterie adaptables. Pour un cadre qui dure (beaucoup) plus longtemps que les gammes des motoristes - qui permet au besoin d’adapter un moteur générique, ou pas de moteur du tout.
Offrir un vélo durable, c’est aussi la raison du choix de composants de qualité, et d’un traitement par cataphorèse ** de nos cadres, fourches et racks avant peinture, pour garantir une tenue à la corrosion optimale dans la durée.
7/ Un vélo couteau-suisse
Un vélo pour voyager, un autre pour aller se défouler le soir, un autre encore pour transporter les enfants, les courses ou son équipement professionnel.
J’ai voulu que Zag puisse tout faire – ou presque :
Il ne suivra pas un VTT partout – son terrain de jeu favori offroad, c’est le gravel, même si la roue avant déportée le rend à mon goût plus rassurant qu’un vélo classique dans une descente abrupte.
Il ne remplacera pas un Bullitt X pour transporter 300 litres à l’avant – mais il peut accueillir une caisse de 130 litres, ou tracter une remorque Fleximodal/Carla Cargo et ses 1500 litres de capacité.
Il n’embarquera pas 3 ou 4 enfants comme certains bi/triporteurs – mais on peut monter un siège enfant sur le rack avant et un autre sur le porte-bagage arrière.
Cette polyvalence guide plusieurs choix : solides dropouts pour accueillir sans problème un porte-bagage arrière de 40 kg ou une attache remorque, support de béquille compatible latérale/centrale, éclairages avant et arrière fixés dans/sur le cadre et utilisables sans garde-boues, inserts pour fixer cargo cages ou porte-bidons sous les top tube et le downtube…
… et un rack avant compact mais très polyvalent, pensé pour accueillir le maximum de supports : caisse, plateau, siège enfant, et évidemment sac de voyage - promis, on vous les détaille tous bientôt !
* Les tubes du cadre sont en acier chromo 25CrMo4 (chromoly ou 4130 steel en anglais), c’est-à-dire un acier au chrome-molybdène. Il a une résistance à la traction de 750 MPa - soit 3 fois plus qu’un acier standard, ce qui signifie qu’il peut encaisser une contrainte de 7.5 tonnes/cm2 avant de rompre. Sa limite d’élasticité, à savoir la contrainte maximale pour laquelle il revient à sa forme initiale sans subir de déformation permanente, est d’environ 600 MPa.
Pour les tôles (support moteur, dropouts…), c’est un acier S 500 qui a été utilisé. Sa composition est un peu différente de celle de l’acier chromo, mais sa résistance reste élevée (limite d’élasticité > 500 MPa).
** La cataphorèse consiste à immerger une pièce métallique dans un bain, pour que se dépose une fine couche protectrice sur l’ensemble des parois, intérieures comme extérieures. C’est également mon premier cadre Sobre qui m’a permis de découvrir cette technique (et de la garder dans un coin de ma tête « pour le jour où… » )